Traduction d’une lettre d’un Anglais (extraits), sur les traitements infligés aux fédérés par les Versaillais.
"Général,
...à Sceaux un capitaine d’infanterie nous fit arrêter, sous le prétexte que nos laissez-passer pour Versailles ne suffisaient pas pour nous permettre de rentrer à Paris.
Conduits de poste en poste, nous arrivâmes enfin à Versailles à quatre heures de l’après-midi.
On nous dirigea sur une caserne de gendarmerie où nous trouvâmes un garçon de treize ans, une vieille femme de cinquante ans et deux ouvriers, arrêtés tous les quatre en retournant de leur ouvrage au collège de Sainte-Barbe, à Fontenay.
Je m’arrête sur ces détails pour que vous puissiez vous former une idée nette des faits, tels qu’ils se sont passés, et juger par vous-même si la façon de procéder du gouvernement de Versailles ne doit pas être condamnée par le monde civilisé.
Une demi-heure après notre arrivée, les gendarmes procédèrent à l’enchaînement des malheureux que je viens de vous mentionner et les lièrent ensemble.
Je déclare que je préférais être fusillé sur-le-champ que d’être pareillement traité, et à force de protestations, on consentit à ne pas nous attacher, mais on doubla notre escorte.
Nous arrivâmes au bout de quelques instants au palais de justice, où on nous poussa dans des caves souterraines dans lesquelles grouillaient environ deux cent cinquante ou trois cents personnes.
Il serait impossible de décrire la scène. Gardes nationaux et civils étaient entassés pêle-mêle dans ce hideux local.
Ces malheureux attendaient leur jugement depuis dix ou quinze jours, sans qu’ils aient eu autre chose à manger que du pain, très mauvais, et de l’eau.
L’infection produite par les baquets d’urine était intolérable. Un vieillard de soixante à soixante-dix ans était littéralement mangé par des insectes.
Le même soir, on amena un gamin de quinze ans environ dont la joue était couverte de sang. Après avoir été fait prisonnier, un officier de la ligne lui avait déchargé son revolver en peine figure et n’avait heureusement réussi qu’à le blesser.
Cette nuit fut pour moi une véritable nuit d’horreur.
Ce qui précède n’est qu’un aperçu simple et court de la façon dont l’on traite les prisonniers à Versailles. Il serait bien que le public en fût informé. Je vous eusse écrit hier, mais je craignais que l’état de surexcitation dans lequel j’étais ne me portât à exagérer. J’ai l’intention d’écrire aujourd’hui à M. Thiers, non pas que j’espère avoir une réponse, mais je crois de mon devoir de protester contre une façon d’agir que répudierait la nation la plus sauvage du globe.
Dans l’espoir que vous voudrez bien prendre en considération les souffrances de nos pauvres parisiens à Versailles,
J’ai l’honneur, etc., etc.
O’LEARY O’BRIEN.
Professeur d’anglais, journaliste, à l’institution,
(Mais qu'est-ce que je raconte, moi ?)
Je l'ai trouvé particulièrement pointu, j'ai dû m'y reprendre à plusieurs fois. Merci, donc !
Merci pour ce hanjie