La petite fille de M. Linh 51

Il regarde le Parc, de l’autre côté de la rue. On voit des mères accompagnées de nombreux enfants y entrer. On devine plus loin des bassins, de grands arbres, ce qui semble être des cages aussi, peut-être destinées à de grands animaux, peut-être à des animaux du pays de Monsieur Linh. Et lui soudain songe que c’est là son sort, qu’il est dans une immense cage, sans barreaux ni gardien, et qu’il ne pourra plus jamais en sortir.
Monsieur Bark, voyant que Monsieur Linh fixe l’entrée du Parc, pointe son doigt pour le lui désigner.
«Là-bas, c’est un autre monde, les gens ne courent plus. Il n’y a que les enfants qui courent, mais eux, ce n’est pas pareil, ils courent en riant. Rien à voir. Vous verriez les sourires sur les manèges! Sur les chevaux de bois de ma femme! Quels sourires! Et pourtant, un manège, ce n’est rien qu’un
cercle qui tourne quand on y pense, alors pourquoi ça plaît tant aux enfants... J’étais toujours ému en voyant cela, en voyant ma femme actionner le manège, savoir que son métier, c’était de donner de la joie aux enfants.»
Philippe Claudel

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