Aujourd’hui, Monsieur Linh est vieux, et fatigué. Le pays inconnu l’épuise. La mort l’épuise. Elle l’a tété comme les chevreaux avides le font avec leur mère, et que celle-ci se couche sur le flanc parce qu’elle n’en peut plus. La mort lui a tout pris. Il n’a plus rien. Il est à des milliers de kilomètres d’un village qui n’existe plus, à des milliers de kilomètres de sépultures orphelines des corps morts à quelques pas d’elles. Il est à des milliers de jours d’une vie qui fut jadis belle et délicieuse.
Philippe Claudel