La petite fille de M. Linh 149

Puis lentement il finit par se relever. Les gens le regardent, interrogateurs. Ils se reculent et c’est justement quand l’un d’eux se retire, comme on se retire devant plus beau et plus lumineux que soi, que Monsieur Bark aperçoit, aux pieds de cet homme, Sans dieu, la jolie poupée dont son ami Monsieur Tao-laï ne se séparait jamais, ayant pour elle des attentions de tous les instants, comme s’il s’était agi d’une véritable enfant. Le cœur de Monsieur Bark bondit dans sa poitrine en voyant la poupée aux beaux cheveux noirs. Elle est vêtue de la robe qu’il avait offerte à son ami pour elle. Ses yeux sont grands ouverts. Elle n’a rien. Aucune éraflure. On dirait qu’elle semble juste un peu étonnée, et qu’elle attend.
Le gros homme se penche, la prend délicatement. «Sans Dieu», murmure-t-il à son oreille en souriant malgré les larmes qui commencent à brouiller son regard.
Philippe Claudel

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