Le temps des cerises (131)

Parmi les témoignages de l'époque qui nous sont parvenus, il y a les lettres de Louise Milliet, restée à Paris, à son mari Félix.
"Le fort d’Issy … est en triste état. Il se fera probablement sauter mais la position ne sera pas plus tenable pour les Versaillais que pour les fédérés. J’espère que tu ne crois pas un mot de tous les mensonges dans les journaux de Versailles. Il est impossible d’avoir plus de mauvaise foi. Comprend-on ce gouvernement qui s’obstine à considérer la révolution de Paris comme le fait d’une poignée de factieux. Une poignée de factieux qui a fait faire le gouvernement, une poignée de factieux qui tient en échec la plus belle armée que l’on ait jamais vue, et cela depuis six semaines et ils n’ont pas fini. Il devraient comprendre qu’il y a quelque chose au fond, une idée qui vaut la peine d’être discutée, mais non, ils sont aveugles comme tout ce qui est vieux et tout ce qui est destiné à tomber. Pour moi je crois que c’est l’enfantement laborieux d’une ère nouvelle et non l’agonie de la France. Aussi je regarde et j’écoute, le grand malheur c’est que les hommes manquent, d’un côté il n’y a que les vieux rogatons de 1830 et de l’autre des fruits verts pas mûrs du tout. Les révolutions mûrissent vite les hommes mais pas assez encore pour nos besoins pressants. Voici ma conviction, c’est que quand même l’Assemblée vaincrait Paris elle sera obligé de lui accorder les franchises municipales. L’idée est bien plantée et arrosée de trop de sang pour qu’elle ne pousse pas. Autant vaudrait s’exécuter tout de suite."

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