Le Petit Prince 64

Nous en étions au huitième jour de ma panne dans le désert, et j’avais écouté l’histoire du marchand en buvant la dernière goutte de ma provision d’eau :
– Ah ! dis-je au petit prince, ils sont bien jolis, tes souvenirs, mais je n’ai pas encore réparé mon avion, je n’ai plus rien à boire, et je serais heureux, moi aussi, si je pouvais marcher tout doucement vers une fontaine !
– Mon ami le renard, me dit-il...
– Mon petit bonhomme, il ne s’agit plus du renard !
– Pourquoi ?
– Parce qu’on va mourir de soif...
Il ne comprit pas mon raisonnement, il me répondit :
– C’est bien d’avoir eu un ami, même si l’on va mourir. Moi, je suis bien content d’avoir eu un ami renard...
« Il ne mesure pas le danger, me dis-je. Il n’a jamais ni faim ni soif. Un peu de soleil lui suffit... »
Mais il me regarda et répondit à ma pensée :
– J’ai soif aussi... cherchons un puits...
J’eus un geste de lassitude : il est absurde de chercher un puits, au hasard, dans l’immensité du désert. Cependant nous nous mîmes en marche.
Antoine de Saint-Exupéry

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