La petite fille de M. Linh 106

Il attend le jour favorable, un jour très beau. Et ce jour arrive. Monsieur Linh a tout prévu. Il partira après le repas de midi. Arrivé au réfectoire parmi les premiers, il mange copieusement, terminant son assiette, reprenant deux fois de la nourriture car il lui faudra des forces.
Une femme en blanc s’approche, lui met la main sur l’épaule, sourit en le regardant manger. Ses voisins de table sont toujours aussi indifférents. Leurs pupilles sont comme des cailloux vitreux posés au centre d’une flaque d’eau dont les bords seraient un peu rougis. Monsieur Linh ne s’en
préoccupe pas. Il mange et mange tant qu’il finit par se sentir lourd, lourd et fort. Il peut y aller. Oui, maintenant il peut y aller.
Philippe Claudel

Log in to play

Comments